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Chapitre 14 : Le principe complexification / plénarité et le modèle ontothérapeutique

Sandor FERENCZI

FERENCZI s'est attelé aux problèmes techniques lorsque la méthode psychanalytique a commencé à manifester ses limites. II a développé là un merveilleux sens de la thérapie qui mérite d'être scruté de plus près, nous l’avons vu ci-dessous.
 
a)     La thérapie active.
 
Dans un premier temps, FERENCZI introduit tout simplement des "mises en acte" aux moments privilégiés que sont les résistances et les blocages; il demande d'agir les souvenirs et fantasmes qui émergent, mais qui n'arrivent pas à faire bouger les résistances et les blocages malgré leur analyse et leur compréhension. Voici un passage de l'analyse d'une jeune pianiste talentueuse qui présentait des troubles d'exécution en public.
"Nous devons l'amélioration la plus importante à la découverte de l'onanisme inconscient de la patiente, mis en évidence à l'aide de "l'activité". Au piano, elle éprouvait - à chaque geste un peu violent ou passionné - une sensation voluptueuse au niveau des organes génitaux qui étaient excités par le mouvement. Elle fut obligée de s'avouer ses sensations flagrantes après avoir reçu l'ordre d'adopter un comportement très passionné au piano ainsi qu'elle l'avait vu faire à de nombreux artistes" (Ferenczi Œuvres III p. 122 et 123).
Schématisons ce qui se passe au moment où la pianiste exécute l'acte demandé par l'analyste:
-   elle exprime des gestes passionnés,
-   éveille des sensations voluptueuses
-   et reconnaît le lien entre les uns et les autres,
-   le tout, simultanément et avec intensité.
En d'autres mots, le moment fort est ici la coexistence:
-   d'une expression: les gestes passionnés;
-   d'une impression: les sensations voluptueuses ;
-   d'une compréhension: leur reconnaissance sous forme d'aveu.
  
 
schéma 40
Schéma 40 : le moment thérapeutique dans la thérapie active.
 
 
Dans cette "thérapie active", le déclenchement se fait sur injonction, sur proposition d'un travail corporel, qui est bloqué dans l'attitude névrotique de la pianiste. La répétition de telles mises en acte a amené la guérison de cette patiente.
 
b)     La relaxation ou néo-catharsis.
 
Dans un deuxième temps, FERENCZI abandonne l'intervention active. Il propose maintenant un contact physique avec le patient. Voici ce qu'il en écrit dans les notes informelles de ses dernières années:
"Certains (patients) s'assurent de notre bienveillance de manière vraiment infantile en prenant notre main, en la tenant même pendant tout le temps de l'immersion (Versenkungszeit). Ce qu'on appelle transe (Trance), est donc, pour ainsi dire, un état de sommeil avec maintien de la capacité de communication avec une personne sur qui on peut compter. Une légère variation dans la force de la poignée de main devient là le moyen d'expression de l’émotion... Quand le rapport avec le patient a plus ou moins duré de cette manière, dans une conversation en demi- sommeil pour ainsi dire... le patient peut brusquement être submergé par un véritable cauchemar hallucinatoire où il agit en mots et gestes un vécu (Erlebnis) interne ou externe" (Ferenczi Clinique p. 235-236).
Ce texte apparemment touffu nous permet ici encore une schématisation du processus thérapeutique ;
 
 
schéma 41
Schéma 41 : l'état néo-cathartique
 
Là aussi, l'expérience du patient se déroule simultanément, sur les trois modes fondamentaux :
-   relationnel: sécurisation par la main de l'analyste;
-   psychique: images hallucinatoires;
-   moteur: mots et gestes.
Cette expérience se déroule en situation, en insertion dans l'environnement, avec l'analyste qui communique par l'intermédiaire de la main. Mais, au niveau psychique, il existe une coupure d'avec l'état d'éveil. FERENCZI appelle cela: immersion, demi-sommeil, sommeil avec conversation... Il faut souligner que la description de ce qui se passe à ce niveau psychique est malaisée.
Avec ces méthodes, FERENCZI s'est engagé dans une impasse, du moins à l'intérieur du courant psychanalytique. Il ne faut donc pas être surpris si nous retrouvons ses propositions techniques dans des cadres méthodologiques très différents. Mais il n'y a pas de rupture entre FREUD, FERENCZI et les auteurs que nous abordons maintenant, JANOV et CASRIEL; tout comme il n'y a pas de rupture essentielle entre la parole, le cri et le contact.
 

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