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Chapitre 11 : Les applications du modèle ontogénétique

II. Etapes de vie, étapes de maladie : le modèle ontopathologique

Autant l’appeler « ontopathologie ». A l’époque, tout était psycho- (-iâtrie, -thérapie, -logie,       -pathologie). Aujourd’hui on s’en mord les doigts. A force de crier au loup… on s’enferme réellement dans cette seule dimension psycho- tout en sachant que tout est en tout, psycho-, socio- et somato-. Et l’on dépense une énergie folle à reconnecter psycho-, socio- et somato-. Autant ne pas les séparer… Alors essayons « ontopathologie ». Ça rendra la psychosomatique caduque.
Est-ce que le charme de l’intégral va encore agir ? Est-ce que ce tout qui est plus que l’ensemble des parties va encore apporter sa nouveauté ?
De toute façon, en ce qui concerne la pathologie, les professionnels sont étonnamment humbles et modestes actuellement. Les deux manuels de référence (CIM 10 et DSM IV) ne sont plus que des classifications et des descriptions. Les anciennes psychopathologies nationales n’étaient que des théories dont on reconnaît le vieillissement. Il n’y a plus que les psychanalystes pour s’accrocher aux conjectures freudiennes vieilles de cent ans.
La profession sait qu’elle ne sait pas, et c’est tout à son honneur. Aussi toute proposition est-elle bienvenue, pour peu qu’elle se soumette aux tentatives de falsification des spécialistes. Alors essayons.
L’intégration de la clinique et des théories psychopathologiques donnera lieu au deuxième tome de cet ouvrage. Mais nous ne pouvons pas ne pas en dévoiler l’esquisse dans ce premier volume puisque des bribes en ont déjà été lâchées, à propos des troubles de la personnalité notamment. Nous nous référons aux pathologies répertoriées dans les deux manuels (CIM et DSM) et nous les organisons en fonction de trois critères principaux.
 
1)            La gravité 
Nous retenons les trois degrés qu’évoquent les termes techniques :
-          symptôme : gravité de premier degré ;
-          caractérome (ou trait de personnalité troublé) : deuxième degré ;
-          syndrome : maladie psychiatrique grave, de troisième degré de gravité.
 
2)            La polarité structuro-fonctionnelle 
Elle se construit sur un vecteur vertical situant le pôle purement structurel en haut et le rôle purement fonctionnel en bas ; la normalité se situe au milieu dans un créneau qui contient la pulsation existentielle entre deux limites afin de protéger l’unité de l’être, son unification ; lorsque cette pulsation déborde cette première limite elle bute sur
-          une deuxième limite, symptomatique, en stress (vers le haut), en choc (vers le bas) ;
-          une troisième limite, caractérotique, en clivage (excès de structure), en amalgame (excès de fonctionnalité) ;
-          une quatrième limite, syndromique, en dissociation (en haut), en confusion ou dissolution (en bas).
Cet axe de polarité structuro-fonctionnelle figure à gauche, en ordonnée. Nous ne justifierons pas ici le bien-fondé des emplacements des différentes pathologies selon le pôle et la gravité. Mais le choix proposé bénéficiera peut-être de sa vertu d’intégration et facilitera quelques flashs de compréhension. Tout dépend du transfert, encore : si vous êtes déjà braqué, tout sera faux ; si vous lâchez-prise, des intuitions se feront. Mais ce qui nous intéresse plus encore ici c’est le troisième critère d’ordonnancement.
 
3)          Les étapes ontogénétiques
Comme nous l’avons déjà vu sur les présentations partielles de ce modèle ontopathologique, nous différencions les grandes pathologies selon les six étapes de développement. Rappelons-nous que ces étapes se construisent sur le critère relationnel : seul, à deux, à trois ou plus, en groupe social, en couple affectif et de nouveau seul. Or la pathologie que nous prenons en charge en psychothérapie est un ensemble de troubles issus principalement de mauvaises expériences relationnelles. Autant dire que ce sont des troubles dus à des étapes relationnelles perturbées. Il y a deux critères qui permettent d’attribuer les principales maladies à des stades de développement précis :
-   la manifestation des symptômes lors de l’étape concernée,
-   la mise en place de la structure pathologique au cours d’une étape donnée même si les manifestations ne surviennent que plus tard.
 
On se laissera inspirer directement par ce tableau pour les différentes classifications du tableau : même si ce n’est pas totalement exact, ça doit éclairer ou, du moins, interroger. Lorsque je propose cet enseignement aux futurs psychothérapeutes, ça prend deux jours et c’est certainement suggestif. Ils entrent dans le cœur même de chaque pathologie par sa seule polarité, par sa gravité, par son époque de survenue et ils n’ont plus besoin d’apprendre par cœur la longue liste des symptômes prônée par les manuels ou les théories psychopathologiques. Quant aux psychologues cliniciens qui ont longuement étudié la question sur les bancs de la fac, ils trouvent dans ce tableau une mise en ordre tout à fait bienvenue sans avoir à (trop) en redire.
 

tableau 32
Tableau 32 : le mondèle ontopathologique

Les trois boucles sinusoïdes à amplitude croissante décrivent la pulsation existentielle dans ses trois états :
-   pulsation plénière à l’intérieur des deux limites du champs unifié,
-   labilité émotionnelle allant jusqu’à stress et choc,
-   ambivalence débordant vers clivage et amalgame.
 
L’écolose
Rappelons-nous aussi que ce modèle ontopathologique fera la trame du deuxième tome de cette oeuvre. En attendant, il nous donne l’occasion d’élaborer une nouvelle pathologie qui n’existe dans aucun livre et que l’actualité me pousse à proposer. Les médecins, psychologues et futurs thérapeutes – parmi lesquels le souci écologique est très éveillé – m’encouragent à officialiser la chose. Il s’agit de « l’écolose » ou pathologies des actes et attitudes anti-écologiques ainsi que des réactions produites par les dégâts écologiques. Les écoloses se déclinent comme les socioses et prennent place à côté d’elles. En effet c’est l’adulte socialisé qui en porte la principale responsabilité. En voici la schématisation sur le modèle ontopathologique puis des illustrations.
 
Les écoloses
 
 

tableau 33

Tableau 33 : les six états de l’écolose
 
Ecopsychose : le déni quasi psychotique de la responsabilité humaine dans le changement climatique ; exemple : Georges W. Bush lors de son premier mandat ;
 
Ecopathie : activité délibérée, importante, aux seules fins de profits personnels contre la nature et la planète ; exemple : les capitaines d’industrie et actionnaires hyperpollueurs ;
 
Ecodélinquance : actes bénins et répétitifs préjudicialbes au climat (vous et moi !)
 
Ecophobie : anxiété liée aux menaces du climat ; par exemple le tout récent « syndrome d’hypersensiblité chimique multiple » que des petits malins promeuvent pour récupérer les victimes anxieuses ;
 
Ec’obsession compulsive : comme d’aller se terrer au fin fond des vallées vosgiennes pour échapper à la pollution et de refuser d’enfanter pour ne pas jeter de nouveaux êtres dans la tourmente climatique ;
 
Eco-lancolie : il faut entendre « mélancolie », trouble de l’humeur grave provoquée et stimulée par la fournaise apocalyptique subie réellement ou fantasmée sinon délirée.
 
Est-ce sérieux ? Oui, très ! Et les pointes d’humour qui émaillent ces illustrations sont plutôt noires. Ça ne fait pas rire, au contraire. Il me semble important de pathologiser aussi les manquements envers la planète comme envers la société. Il ne suffit plus de fixer une simple amende à l’écopathe, amende qui n’atteint pas le dixième du bénéfice que tire ce pervers de ses transgressions. Et moi, qui joue à la bourse des valeurs ?
Récapitulons la liste de nos nouveaux malades : écotiques, écopathes, écolinquants, écophobiques, écot.o.c., écolancoliques !
 

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