Chapitre 4 : La présence juste et le processus de la présence Présence juste : une pratique, une attitude, un état d'être La Présence Juste est une pratique issue de la rencontre des méthodes somatothérapeutiques et des besoins et expériences personnelles de son fondateur. Les premiers textes ont décrit l'événement fondateur, un moment d'angoisse sur un télésiège bloqué au dessus de l'abîme qui a permis la mise en place du protocole de base à même de relaxer, apaiser, mettre à distance. L'enseignement aux élèves de l'École Européenne de Psychothérapie Socio- et Somato- Analytique (Eepssa) rappelle tout autant le second événement fondateur, une profonde douleur affective qui a subitement éveillé la circulation énergétique (kundalini) et tracé l’axe en soi. Enfin les péripéties de la pratique quotidienne viennent enrichir ces acquis de base de toutes les luxuriances de l'ouverture à la volupté, à la vérité et à l'amour.
La dénomination "Présence Juste" permet d'englober ces trois niveaux de la pratique, de proposer l'exercice à des patients et d'y former les psychothérapeutes, tout en accompagnant ceux qui le désirent dans l'extension au bien-être, au savoir-être d'excellence et à la méditation. LE PROTOCOLE DE LA PRESENCE JUSTE
Chacune de ces sphères est abordée spatialement (en bas, en haut, derrière et devant) pour obtenir une globalité (sphérique) et, grâce à elle, une saturation du champ de la conscience pour fixer cette dernière dans le présent. L'ensemble des quatre réalités situées dans ces quatre directions suffit à cet effet en analogie avec la loi de Miller qui dit que le maximum d'objets perçus distinctement et simultanément est de 7± 2, si on me permet d'extrapoler à partir de ce qui concerne la mémoire immédiate qui ne retient que ce nombre d'items pendant quelques secondes. LA POSTURE ET LA RESPIRATION COMME PREALABLES
Posture et respiration sont les deux éléments objectifs qui servent d'ancrage dans la matérialité, surtout quand l'approfondissement de la pratique emporte dans les subtilités des énergies, sentiments et images. Le protocole de l'exercice fait de même, mais ce protocole peut être sublimé, oublié, transcendé. Pourquoi d'ailleurs un protocole ? Il fonctionne comme les rails pour la locomotive de... James Bond. Vous connaissez sa voiture, voici son train ! La locomotive, c'est le pratiquant. Elle avance sur des rails, il avance sur le protocole. Mais cette locomotive a des ailes escamotables, comme la voiture et, à certains moments, cette locomotive sort ses ailes, décolle, quitte les rails et batifole dans les airs, comme le méditant qui délaisse le protocole. Seulement, de temps en temps, elle s'égare là haut, et puis il lui faut refaire le plein de charbon, aussi redescend-elle sur les rails ; le méditant aussi, pour rester dans la Présence Juste.
Première étape : le sol, en bas
Premiers éléments du réel, en bas : le sol, le siège, le coussin, les accoudoirs. Ces butoirs imposent une certaine attitude du bas du corps. J'essaye de percevoir cette position... (Les points de suspension indiquent un temps de silence pour se concentrer sur l'élément évoqué) : cuisses tendues, fesses serrées, ventre rentré probablement...
Mais ces supports, ce sol, sont solides, je peux m'y fier, m'y abandonner ; je peux leur confier mon corps, le déposer...
"Je suis posé..." (Chacune des douze étapes a son signifiant verbal).
Probablement que mes jambes croisées s'affaissent un peu, mes fesses s'aplatissent, le périnée contacte mieux le support, les sphincters se détendent...
La respiration descend mieux jusqu'en bas, réchauffe le périnée, le connecte au support, pénètre les sphincters, dépose tout le bas du corps...
"Je suis posé"...
Deuxième étape : la pesanteur, en haut
Autre réalité présente, en haut : au-dessus de moi, la pesanteur qui m'écrase, la force de gravité qui me fiche 50, 60, 80 kilos et induit la posture du haut du corps... Épaules qui résistent, tête et buste penchés, respiration avec effort, dos tendu sans doute...
Mais je peux contrebalancer cette force, je peux aller la neutraliser, il suffit de m'étirer vers le haut de me prolonger dans l’axe, de me grandir de la tête, des épaules et du buste, jusqu'au plafond, pas plus loin pour le moment...
Je me mets un chapeau haut de forme de deux mètres et je deviens ce chapeau...
Le haut du corps est comme un vérin : j'appuie sur le bouton, il sort, monte et continue tout seul même quand je n'y pense pas... ça se prolonge...
Je sens l'allégement de la pesanteur, je la neutralise, c'est léger ; la respiration est libre et facile ;
l'esprit se dégage...
"Je suis grand, grande".
L'inspiration soulève les deux épaules et les emmène jusqu'au plafond, comme la tête ; à l'expiration, le thorax se relâche mais les épaules restent là-haut ; ce décrochage de l'anatomie et de la sensation est étrange, libérateur...
"Je suis grand, grande"...
Je n'oublie pas le bas du corps bien connecté aux supports du bas et je suis tout autant allongé jusqu'au plafond en une légèreté étonnante...
"Je suis posé, je suis grand, grande"...
Et s'il y a une image qui vient illustrer cet allongement, cette sensation, je la laisse venir, puis repartir, sans la provoquer, sans la chasser, sans la retenir. C'est aussi un élément du présent que j'intègre dans le champ de la conscience. Seules les images associées aux sensations entraînent la plénitude ; les images qui me font oublier le corps sont en clivage.
Troisième étape : l'énergie du dos
Autre élément du présent, à l'arrière du corps : la chaîne musculaire postérieure qui part de la base du crâne, longe la colonne des deux côtés, se continue dans les triceps, mollets, tendons d'Achille jusqu'à la plante des pieds... Chaîne unique de Françoise Mézière.
C'est elle qui travaille en ce moment pour maintenir l'assise : c'est là que se concentre l'énergie que je peux sentir circuler...
"Je suis fort, forte"...
Elle circule du sol jusqu'au plafond, dans l'axe énergétique du dos, dans l'axe en soi...
Si je la sens coincée quelque part, je reviens sur le dépôt du bas du corps, sur l'étirement du haut du corps, sur cette image d'allongement du corps à 3, 4, 5 mètres... et ça se décoince...
"Je suis posé, grand, fort"...
Elle descend avec l'expiration, elle monte avec l'inspiration, du sol au plafond...
Et cette énergie est couleur, couleur d'arc-en-ciel ; à chaque segment du corps, elle prend une des sept teintes :
- rouge dans le bassin et les jambes...
- orange dans les lombes...
- jaune à l'arrière du thorax...
- verte dans les épaules et bras...
- bleue dans la nuque...
- violette à l'arrière du crâne...
- dorée (ou blanche) dans le chignon au-dessus de la tête...
"Rouge, orange, jaune, verte, bleue, violette, dorée"... Pour les pratiquants avancés, je profite de ce travail de connexion du visuel et du sensitif pour explorer la notion de champ de conscience liée à la loi de Miller citée ci-dessus: "combien de couleurs pouvez-vous voir distinctement et simultanément ?... deux, trois, quatre, cinq... ?
Je vous propose un truc, imaginez votre tronc comme une flamme : rouge-orange-jaune, c'est la base de la flamme qui se continue vers le haut dans le doré ; à l'intérieur apparaissent des teintes plus sombres, verte-bleue-violette, comme un œil, comme la plume de paon ; arrivez-vous maintenant à sentir toute la hauteur du corps, toutes les couleurs de l'énergie, à élargir et saturer le champ de la conscience, jusqu'à être condamné à être là, uniquement là, présent, tout simplement... Si c'est oui, vous expérimentez quelque chose de plus, la plénarité et peut-être la plénitude.
"Posé, grand, fort"...
Quatrième étape : les centres énergétiques de l'avant du corps.
Enfin, à l'avant du corps, s'insèrent tous les organes de communication qui sont autant de centres énergétiques que je peux ouvrir de haut en bas :
- la vue (tout en laissant les paupières fermées)...
- l'ouïe, qui m'apporte les bruits et bruissements du moment... (en pratique avancée, je propose de ressentir yeux et oreilles comme un bandeau énergétique qui entoure le haut du crâne, occupe tout le tour, circule, se réchauffe, s'éclaire, prend la couleur dorée (ou blanche) du chignon, devient lumière, rayonne la lumière... cet éveil peut prendre des mois ou des années à se faire) ;
- l'odorat,
- le goût, à l'arrière de la langue...
- l'air qui rentre par le nez apporte une odeur et quand il sort, il passe sur les papilles de la langue et lui donne goût...
- les lèvres ... que j'arrête de pincer et quienflent, s'entrouvrent... qui amènent le relâchement des masséters et ouvrent légèrement labouche...
- le larynx...
- le cœur... lieu des sentiments...
- le ventre, centre des émotions...
- le sexe...
- la paume des mains avec sa chaleur, son énergie, le faisceau d'énergie qui en sort...
- la plante des pieds, la voûte surtout qui est, comme la paume, foyer d'énergie rayonnante...
"Je suis ouvert, ouverte"... (Ici aussi, on peut essayer de saturer le champ de la conscience en percevant simultanément ces quatre foyers d'énergie (paumes et plantes) ; quand cette plénarité s'installe, s'y ajoute généralement un signe très net de passage à la plénitude avec l'allumage d'un cinquième centre, à l'intersection des quatre premiers, au périnée, au centre ano-coccygien, le centre énergétique de base).
L'ouverture de ces centres de communication se fait en cascade, de haut en bas, comme une eau qui coule sur la peau, comme une bruine qui anime et dégouline...
L'énergie qui monte dans l’axe est l'énergie terrestre, celle qui descend est la grâce céleste...
"Je suis ouvert, ouverte".
Retour à la globalité de la sphère corporelle, énergétique,
"Je suis posé, grand, fort, ouvert"...
Plénarisation : le processus énergétique.
La globalisation de la sphère me fait passer de la simple addition d'éléments à un vécu nouveau, plein, plénier, à un vécu d'énergie...
"Je suis énergie, énergie de vie"...
"Couleur d'énergie"...
"Energie diffuse au-delà des limites anatomiques, centrée par l'axe en Soi"..,
"Vivre"...
DIGRESSION : LES EFFETS IMMEDIATS DE LA PRESENCE JUSTE
Faisons une première pause... théorique. Mais que voulons-nous donc, avec cette pratique ? Nous recherchons deux résultats bien précis :
- se débarrasser de... et se remplir de...
- s'alléger et se lester...
- guérir et grandir...
- enlever... mais remplacer par...
Il est important de remarquer que le seul processus d'élimination des symptômes ne suffit pas, élimination de :
- la tension musculaire
- l’hyperactivité mentale,
- la préoccupation exagérée par les événements.
Si on enlève seulement, on se retrouve dans un manque, un vide, une dé-pression et on n'accédera pas aux véritables :
- relaxation musculaire,
- apaisement mental,
- distanciation relationnelle.
Il ne suffit pas de soulager le "corps de maîtrise" (musculaire), il faut remplir le "corps de jouissance" (végétatif) pour maintenir l'homéostasie et surtout l'homéoesthésie. A cet effet, il faut éveiller et mobiliser :
- l'énergie jusqu'à la volupté,
- la relation aux autres jusqu'à l'amour,
- la vérité jusqu'à la sérénité.
C'est ce que les deux cycles suivants vont continuer à promouvoir - avec de la patience - tout comme le premier cycle l'a déjà fait.
Avec cette bonne énergie que nous “sommes ”, nous pouvons aborder maintenant notre vie relationnelle, entrer en contact avec les personnes de notre vie, personnes présentes, intimes ou plus lointaines, personnes du passé, vivantes ou mortes, personnages de nos fantasmes et de nos rêves d'avenir... Nous pouvons les voir, sentir puis, nous centrer et communiquer.
Cinquième étape : voir
Cette nouvelle énergie de vie nous permet d'ouvrir, en haut, les deux volets de nos yeux et de laisser venir les images -ou pensées- des personnes qui veulent bien se présenter à nous dans ces deux lucarnes...
"Voir"...
Je reste pur observateur, je laisse venir et repartir, j'accepte qu'il n'y ait personne ou que quelqu'un s'installe plus longtemps. Je ne choisis pas et ne veux rien. Je suis pur accueil...
"Voir"...
Il n'est pas facile d'être pur accueil. Si vous vous sentez interventionniste, volontariste, sans pouvoir vous en empêcher, soyez indulgent avec vous, tolérant, laissez venir ça aussi...
Inversement, si la visualisation ne fonctionne pas encore, si le volet n'est pas ouvert, patientez... mais si ça vous énerve, donnez un coup de pouce, faites venir un personnage par la pensée puis mettez-le en image...
"Voir".
Sixième étape : sentir
Chacune de ces personnes éveille des émotions, des affects, des sentiments. En bas, à l'avant, je peux sentir l'émotion dans mon ventre, quand il s'agit de relations sociales ; je peux percevoir des sentiments affectifs dans mon cœur, quand il s'agit d'une personne intime...
"Sentir"...
Là encore, le pur accueil de l'émotion ou du sentiment ne va pas de soi ; c'est un entraînement au laisser-venir, un apprentissage pour celui qui n'en a pas l'habitude. Mais c'est cela la "Présence Juste" dans la vie relationnelle : pouvoir être à la pure écoute de l'autre, pour un bout de temps du moins...
"Sentir"...
"Voir, sentir"...
Vous observez probablement que, face à l'autre, l'énergie de vie se loge à l’avant du corps, dans les yeux, les lèvres, le larynx, le cœur, les tripes, le sexe, les mains qui veulent aller vers ; peut-être tout le corps veut-il se laisser aller vers l’avant, vers l'autre...Ou alors, tout le corps recule-t-il avec telle autre personne, parce qu'il n'y a évidemment pas seulement des attraits, il y a aussi des retraits, des émotions et sentiments désagréables... Tout se passe à l’avant du corps.
"Voir, sentir"...
Septième étape : centrer
La position de l'énergie à l'avant du corps rend l'équilibre instable, la présence vulnérable, la personnalité fragile. Aussi je vous propose de vous centrer, équilibrer, re-centrer dans l'axe énergétique, dans l’axe en soi, en déplaçant l'énergie de l'avant du corps vers l'arrière, dans l'axe, dans la couleur, dans la force du dos...
Tout comme le haut du corps se déplace jusqu'au plafond, les sensations de l'avant du corps se glissent vers l'arrière.
"Centrer"...
Ce recentrement de la masse énergétique se fait aisément et il se passe bien autre chose en plus : je me sens moi-même face à l'autre, stable, moins préoccupé, moins menacé ou dépendant, je suis moi, droit dans mes bottes ; j'ai toute ma valeur face à l'autre, toute ma liberté...
"Voir, sentir, centrer"...
Vous constatez que vous arrivez à voir l'autre plus longuement, plus simplement, même ces personnes qui partaient (que vous faisiez inconsciemment partir) très vite. Il y en a de nouvelles qui peuvent arriver...
Ce que chaque personne fait ressentir s'atténue quelque peu, surtout quand c'est désagréable. Mais vous ressentez aussi plus fort ce qui mérite de l'être, surtout l'amour qui demande de l'engagement, et la haine qui veut du dégagement...
Ainsi nous ajustons encore mieux la présence à l'autre : voir et sentir en pur accueil tout en étant centré dans l'axe, du moins aussi longtemps que je n'ai pas décidé de ce que je veux avec cette personne.
"Voir, sentir, centrer"...
Huitième étape : communiquer
Ce n'est que lorsque j'ai bien accueilli l'autre et que je me sens pleinement centré en moi que je peux passer à l'étape active : communiquer. Et c'est avec tous les centres de communication ouverts à l'avant du corps que je peux le faire :
- regarder, au-delà du voir,
- écouter, au-delà de l'entendre, ce que je ne peux pas percevoir,
- humer, flairer, goûter,
- embrasser,
- parler, susurrer, dire ce que je n’ose pas dire,
- serrer contre mon cœur, contre mon ventre, mon sexe,
- toucher, me laisser toucher,
- envoyer l'énergie de mes paumes et des plantes... recevoir celle de l’autre,
"Communiquer"... A présent, j'ai le droit de retenir le visiteur que je veux, de le faire partir, d'en faire venir un autre, de communiquer activement...
Mais c'est de l'arrière que vient le mouvement de communication, de mon axe, il ne fait que traverser l'organe correspondant à l'avant : je reste centré dans mon énergie de vie. Je reste stable, en équilibre, sans chavirer vers l'avant ou l'arrière...
"Voir, sentir, centrer, communiquer"...
C'est probablement une sensation toute nouvelle que de sentir la communication qui part de mon centre et non de ma superficie... Est-ce que je sens la différence de ce que je fais - ou suis- d'ordinaire ?...
Voilà réellement les quatre ingrédients de la bonne présence à l'autre : voir, sentir, centrer, communiquer...
Plénarisation : le processus affectif
Ainsi se globalise aussi cette deuxième sphère relationnelle,
- avec les quatre temps de toute rencontre,
- avec les quatre lieux de la sphère, en haut, en bas, derrière, devant...
J'accède à la plénarité, c'est plein ; je ressens probablement déjà de la plénitude : ce qui vient en plus, spontanément, à contempler, c'est le sentiment affectif : convivialité, compassion, amour mais peut-être aussi peur, colère, haine... Je me laisse aller à cette contemplation, à aimer...
"Aimer"...
Le mot "spirituel" est l'adjectif du mot "esprit". Il représente ce que sécrète le cerveau et, pour l'expérimenter, il faut tout simplement mettre l'esprit dans la situation où il sécrète le plus intime de lui-même, à savoir dans le non-faire et le non-dire. Ce sont les traditions - universelles - et la science qui nous l'enseignent...
A présent, remplis de bonne énergie et de pur amour, laissons-nous progresser vers la sphère ultime, de la terre, de l'éthique, de l'univers...
Neuvième étape : la terre
En bas, nous sommes assis non seulement sur le coussin mais sur la terre, sur la planète, sur cette merveilleuse et unique demeure de l'humanité...
Nous sommes comme le Petit Prince sur le globe, ainsi que l'image omniprésente nous l'a montré... Laissons venir les images de cette terre, les bruits et odeurs de la vie, qu'il s'agisse d'évocations dirigées ou de contemplats inopinés... la nature, les animaux, les paysages, tel lieu privilégié, tel autre endroit récemment visité ou marqué par la présence d'une personne aimée.
Cette terre est matière, la même matière que celle dont je suis fait ; je suis terre : je viens de la terre, j'appartiens à la terre et y retournerai... Memento homo quia pulvis es.
"Terr'être"...
La terre me donne tout ce dont j'ai besoin pour vivre. Je suis intimement connecté à elle, dépendant d'elle... air, eau, feu, aliments, beauté... Je prends et je rends, je reçois et redonne... (je trie mes ordures !)
La terre, c'est aussi l'humanité dans laquelle je suis tout aussi intimement intégré... "Terr'être"...
Dixième étape : dire non
Cette terre, unique et en danger, me donne aussi des responsabilités.
La vie, imparfaite et fragile, m'impose aussi des devoirs...
L'éthique m'oblige parfois à dire "non"...
"Non"...
"Non" à tout ce qui met la terre, l'humanité, la vie, et la mienne en particulier, en danger...
Je pense peut-être à l'une ou l'autre situation précise dans laquelle je dois actuellement dire "non"...
"Non" à tout ce qui s'oppose aux valeurs, idéaux, engagements...
Ce "non" est un acte qui sécurise, qui rassure, qui libère...
C'est dans l'énergie de mon dos que je dis ce "non"...
Ce "non" est constructif, créatif...
Dire "non" me fait exister et être...
"Terr'être, Non"...
Onzième étape : dire oui
Et si je peux dire "non", je peux aussi dire "oui"...
C'est à l'avant, avec tous mes centres de communication ouverts, que je dis "oui"...
"Oui" aux valeurs, idéaux, engagements...
"Oui"...
"Oui" à mes modèles et maîtres qui me font progresser...
"Oui" aux croyances, à ce qui est au-dessus et au-delà de moi, à Dieu s'il existe pour moi... "Oui"...
C'est avec toute mon énergie et tout mon amour que je dis "oui"...
"Terr'être, non, oui"...
"Oui à ma démarche de progression, d'expansion, d'accomplissement...
Douzième étape : l'univers
L'énergie, l'amour et l'éthique m'outillent suffisamment pour aller enfin à l'ultime, à l'universel, au spirituel... Je suis terre, je suis aussi univers...
"Univ’être"...
Les atomes de mon corps étaient déjà là il y a quinze milliards d'années, dans le big bang...
Les atomes de mon corps seront encore là dans quelques milliards d'années, disséminés aux confins de l'univers...
"Univ'être"...
Me sentir à cet instant aux dimensions de l'infini me fait aussi expérimenter l'étincelle de l'éternel...aïon, plénitude.
Qu'est-ce alors que le mal. la maladie, le malheur, face à l'univers ?...
Qu'est-ce que la mort face à l'infini et à l'éternel ?...
Qu'est-ce qui peut encore ébranler la sérénité de cet "univ'ètre" ?...
"Univ'être"...
PLENARISATION
"Terr'être, non, oui, univ'ètre"...
"Energie, Amour, Sérénité"... "Etre"...
Mais, en attendant, la pratique reste liée au temps ! Il faut revenir ! Selon les obligations du moment :
- on restera dans cette sérénité spirituelle si rien de trop contraignant ne nous attend,
- on reviendra à l'amour du deuxième cycle si nous devons rencontrer des gens,
- on s'installera dans l'énergie plus ou moins diffuse ou centrée dans l'axe si c'est un boulot plus matériel qui est pendant.
Du reste, avec l'expérience, cette adaptation se fera globalement, comme un de ces contemplats qui nous surprendra ! Je suis tout simplement là, pleinement là.
Du reste, on n'est pas obligé de faire le grand tour, de pratiquer les trois cycles. Certains patients ont encore trop d'émotions négatives en laissant venir leurs "chères" relations, il leur faut encore de la thérapie. D'autres ne sont pas prêts pour le travail spirituel. De toute façon, le cycle énergétique est le plus simple et le plus valorisant, au risque de devenir une drogue ! Mais certaines de ces inhibitions peuvent se soigner par les protocoles spécialisés dont j'évoquerai les plus intéressants, un peu plus loin.
DIGRESSION : QU'EST- CE QUE LA MÉDITATION ?
Le texte qui inaugure la Présence Juste ( MEYER 1992) montre très clairement qu'il s'agit d'une somatothérapie et non pas d'une méditation. De toute façon, cette " auto-somatanalyse " doit rester une pratique à visée professionnelle que les patients peuvent intégrer sans aucune peur de récupération de quelque ordre que ce soit. C'est ce que j'ai observé tant chez les patients que chez les thérapeutes en formation. Et pourtant cette pratique peut déboucher sur les vécus mêmes qui adviennent dans certaines " méditations " à visée plus spirituelle comme les pratiques bouddhistes, zazen en particulier, les exercices d'Ignace de Loyola, les esquisses d'extase, mais aussi les méditations philosophiques ou new age ! La grande différence réside dans l'exploitation de la pratique : dans les dernières citées, on recherche un contenu, dans La Présence Juste, on se réfère aux processus. L'expansion du corps énergétique, l'éveil du sentiment d'amour, la sérénité de l'esprit sont les processus fondamentaux que nous traquons. Vérité, volupté et aimer sont les enjeux. Mais ces processus peuvent-ils ne pas se structurer et s'enfermer dans ces nouveaux cadres restrictifs que sont les contenus précisément ? La volupté du corps peut-elle échapper à la polygamie que préconisait C.G.Jung ? Le processus amoureux peut-il ne pas se réfugier dans la jalousie et l'exclusivité, pour ne pas parler de l'érotomanie ? Voilà l'enjeu.
C'est la libération du processus qui apporte le bien-être, le plaisir, la félicité, tandis que la structuration, elle, amène au désagrément de par le recadrage qu'elle impose à la fonctionnalité. Or, on l'aura compris, la Présence Juste œuvre à l'allégement progressif de la maîtrise (structure) pour laisser le plus de liberté possible à la jouissance (processus). Mais tel est aussi le but de la plupart des méditations, à deux détails près :
- elles maintiennent un certain cadre qui canalise les effets : on évitera la volupté sexuelle pour privilégier la félicité spirituelle par exemple ;
- elles préconisent un contenu et des objets, un dieu à aimer par exemple, pour ne pas s'éparpiller dans une succession de partenaires humains ; à la rigueur, un seul partenaire pour la vie!
Mais qu'est-ce encore que la méditation ? C'est une pratique d'intériorisation qui éveille les processus internes, à savoir les trois principaux évoqués tout du long : énergétique, spirituel et affectif. Nous verrons cela plus précisément dans la dernière partie de ce texte.
Dans ma jeunesse, j'ai beaucoup pratiqué la méditation chrétienne. Elle consiste en une posture (agenouillée puis assise) et en une lecture de texte généralement (mais aussi l'adoration du saint sacrement, ou d'une icône). Que faire de ce texte ? Exactement la même chose que du discours psychanalytique. Il faut traverser la matérialité des mots pour arriver au signifié ; il faut subvertir le symbole pour accéder à la vérité : derrière la crucifixion de Jésus, il faut ressentir son amour tout comme derrière le silence de l'analysant, il faut subodorer son sentiment transférentiel. Mais dans les deux cas se propose aussi la structuration : Jésus canalise l'amour, le concept de transfert prévient l'irruption érotomane.
Et qu'en est-il pour la Présence Juste ?
C'est le respect du protocole qui fait cadre et sécurité. Et pourtant, comme nous le verrons plus loin, on arrive à dépasser le protocole et à entrer directement dans les purs processus (avec un minimum de structure). Pour le thérapeute en formation, il y a alors occurrence et observation en direct de la création en temps réel des protections, défenses, structurations nécessaires. Et puis, un jour, il n'y aura même plus structure et seulement éveil processuel et accès à l'ordre intrinsèque : vérité, volupté et aimer. En fait, ces trois processus se structurent réciproquement de par leur seule coexistence. L'aimer structure la volupté, la vérité cadre l'aimer et la volupté informe la vérité...
La Présence Juste recrée un autre processus... celui de la méditation elle même. Elle nous replace aux origines de sa mise en œuvre, à l'origine du phénomène de civilisation, de religion, de morale.
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